la cage est ouverte

Une critique du Grésil de Jacques Dupin (1996)
en forme de poème

Jacques Dupin par Francis Bacon (1971)

*
*

************Tout a commencé
par la fin.

J’avais quatre ans.

Moi « l’enfant migrateur »

************* né dans « un berceau soulevé dans l’air »

je faisais face à la mort
à ce qui s’en suit.

Dans ces moments toujours
«          les séquelles

le supplice

gravent

ce qui s’envole et s’enterre ».

C’était il y a longtemps.

Je suis resté « là [où] il n’y a plus de points
ni de lignes, ni de crampons
dans le schiste ».

Depuis j’ai appris qu’ « il faut écrire il faut             rire » –  

« le rire des morts » et celui de « l’amour
perdu » de celui qui dort
« en chien de fusil ».

Sur « la page-plaie »
j’ai écrit nos deux noms couleur
************** « bleu blanc de la cendre »

j’ai écrit pour que l’air s’invite dans la cage
j’ai écrit tu as fui        à peine avais-je ouvert.

Je ne dors plus vraiment.

Ils sont sans appel : « le sommeil troué ».

Il faut dire que « les rêves sont insipides
quand ils dorment seuls ».

Tout se passe à la montagne.

“Mais qui l’a voulu ?
C’est toi ou c’est elle ?”

« Je dors – je dois dormir ».

J’essaie.

Mais « une cage » – bien que « d’air » –
ce n’est pas un endroit
pour le souffle et les rêves.

Le vent les balaie – le vent
************************* la suffocation –
et j’étouffe mais la cage
est ouverte.  

« Ce qui reste, ce qui respire

dans le mâchefer de ma vie [?] 
*

beaucoup d’ombre

                                  quelques pierres
écrites dans le soleil »

J’ai envie de déchirer la pierre
trouver « l’énergie qui           fractionne ».

quitte à           pas dormir
autant chercher la « vibration            de la lumière
dans la nuit de la couleur »

Mais toi, toi.

« Tu te déplaces entre les couleurs ».

Pourquoi es-tu partie et moi toujours là ?

Je veux aller à la mer.

Je suis las des « loups de la voix »,
des bourrasques de la tramontane, des chèvres, de toi.

« Elle va se détruire en moi
comme je
me détruis hors d’elle ».

Elle est l’air de la cage – je n’ai jamais cru à « ton refus de l’air » –

je le savais en écrivant

je le savais en écrivant
mais tu savais mieux que moi
que « la mort est une écriture
de chimères ».

Il n’y a pas d’arbres mais des ronces
et les crêtes sont des bois
d’où chutent
******les corps.

Tous les moyens pour découvrir la chose
doivent être explorés.

Je dis tous mais je pense surtout :
ceux où la chose vient par
« un sentier désaxé
désyntaxé – qui la hisse

d’une encre blanche inconnue

une obscénité bégayante
caressant, roulant cailloux

étranglant torrent
dans la gorge ».

Autrement dit
le clair aux orties et la lumière par la ******* « dictée de pierres ».

Elles pleuvent aujourd’hui
tombent en salve sur la plaie.

Je sais que je les ai faites venir
tout comme je t’ai fait partir

toi comme elles 
**************« lumière errante »
« me regardes
me haïr
».